Introduction:
Aujourd’hui, le kimono est perçu comme un vêtement cérémoniel, porté lors d’occasions spéciales : mariage, nouvelle année, festivals ou remises de diplômes. Mais il fut un temps où les Japonais le portaient tous les jours, de l’aube au coucher.
Pourquoi ce changement ? Comment ce vêtement est-il devenu un symbole culturel plutôt qu’un habit de tous les jours ?
Plongeons dans le Japon d’avant l’ère moderne pour comprendre pourquoi le kimono était au cœur de la vie quotidienne.
Le kimono : un vêtement universel avant l’occidentalisation
Avant la seconde moitié du XIXe siècle, il n'existait pas de pantalon, de chemise ou de veste au Japon tels que nous les connaissons aujourd'hui.
Tout le monde – hommes, femmes et enfants – portait une robe droite croisée sur le devant : le kimono.
Une structure simple, adaptée à toutes les classes sociales
Le kimono est composé d’un rectangle de tissu plié et cousu selon des proportions précises.
Cette simplicité a permis :
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une fabrication artisanale locale,
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une adaptabilité à toutes les morphologies,
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une réduction des coûts, car peu de tissu est gaspillé.
Il existait ainsi :
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des kimonos en lin ou en coton pour les paysans,
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en soie pour les nobles ou marchands,
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en chanvre pour les moines ou artisans.
Une norme culturelle régie par l’étiquette
Le kimono n’était pas qu’un vêtement pratique. Il incarnait des valeurs culturelles et des codes sociaux stricts.
Le langage du vêtement
La façon de nouer l’obi (la ceinture), le motif du tissu, la longueur des manches ou encore la couleur indiquaient :
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le statut social,
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le métier,
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le statut marital,
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la saison de l’année.
Chaque détail avait une fonction sociale. Porter le mauvais kimono à la mauvaise occasion pouvait être vu comme une insulte à l’étiquette japonaise.
Le rôle du climat et des matériaux naturels
Le Japon étant un pays aux saisons marquées, le kimono s’est adapté au cycle climatique.
L’été et l’hiver : des textiles adaptés
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En été, les Japonais portaient des kimonos légers en lin (appelés yukata), souvent non doublés.
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En hiver, ils utilisaient des kimonos doublés, parfois rembourrés, en laine ou en coton tissé serré.
Un entretien facilité par les coutumes
Le kimono se rangeait plié à plat, ce qui le rendait facile à conserver. Il pouvait être défait, lavé à plat, puis recousu.
Une approche en phase avec l’esprit minimaliste et durable de l’époque.
Le kimono dans la vie quotidienne
Le kimono était omniprésent :
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Pour aller au marché,
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Travailler dans les rizières,
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Assister à des représentations de théâtre,
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Participer aux cérémonies religieuses,
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Ou tout simplement à la maison.
L’obi : plus qu’un accessoire
Selon le contexte, l’obi (ceinture) pouvait être :
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large et décoratif pour une sortie en public,
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simple et fin pour les travaux domestiques,
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noué dans le dos pour la discrétion ou sur le devant pour la praticité.
Les femmes changeaient plusieurs fois de kimono dans la journée selon les tâches.
L’impact de l’ère Meiji : rupture avec la tradition
Tout change avec l’ère Meiji (1868–1912), une période de modernisation accélérée du Japon.
L’ouverture au monde occidental
Face aux puissances coloniales, le Japon s’est lancé dans une modernisation profonde :
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importation du costume occidental,
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adoption de la cravate, du pantalon, du tailleur,
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création de codes vestimentaires officiels pour l’armée et l’administration.
Le kimono devient un symbole d’identité culturelle
Peu à peu, le kimono cesse d’être un vêtement de travail. Il devient :
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un marqueur culturel fort,
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réservé aux événements spéciaux,
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porteur d’une mémoire nationale.
Les classes supérieures et les fonctionnaires abandonnent le kimono au profit du costume, perçu comme un symbole de progrès.
Pourquoi les Japonais y tenaient autant avant ?
Porter un kimono n’était pas qu’une question d’habit. C’était une manière :
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de faire corps avec son environnement,
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de respecter des rituels millénaires,
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de s’aligner à la nature et aux saisons,
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d’exprimer une esthétique de l’harmonie, typiquement japonaise (wabi-sabi, iki…).
Une esthétique du geste
Enfiler un kimono, c’est aussi :
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ajuster les plis,
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aligner les cols,
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nouer avec soin.
Des gestes codifiés, lents, respectueux du vêtement… qui faisaient partie intégrante de la vie quotidienne japonaise.
Un retour progressif dans la culture moderne
Depuis les années 2000, le kimono connaît un renouveau au Japon.
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Mariages traditionnels en kimono,
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Location de kimonos dans les villes touristiques,
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Designers contemporains qui modernisent la coupe,
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Port du yukata lors des festivals d’été.
Le kimono n’est plus quotidien, mais il reste un pilier de l’identité japonaise.
Conclusion
Avant l’arrivée du costume occidental, le kimono n’était pas un vêtement exceptionnel : c’était le vêtement de base de chaque Japonais.
Simple, fonctionnel, évolutif selon la classe sociale et les saisons, il était parfaitement adapté au mode de vie traditionnel japonais.
Aujourd’hui, le kimono a changé de fonction. Il est devenu un symbole, un lien avec le passé, une œuvre d’art que l’on revêt avec fierté et respect.